Histoire de coupe

Peut-être la chose la plus étrange et la plus attachante, en y repensant bien, a été le caractère aléatoire – le manque total de planification – de cette soirée.

Par Mike Stoikopoulos / Traduction Louise Rioux


Nous avions certainement un endroit où être.

C’était soirée de North America Cup, en 2008, et George avait été convoqué pour accomplir son travail. George était de naissance royale, le dernier foal de la légendaire ambleuse Fan Hanover. Son nom de course était Letsmoveon, mais depuis que nous l’avions acheté en 2002, son nom d’écurie a été George, en honneur de son ancien propriétaire.

Il avait connu une assez solide carrière en tant que cheval de course, ayant gagné plus de 100 000 $ - bien loin de l’envergure de sa mère, mais faut-il dire qu’aucun de ses foals ne l’a égalée ou dépassée. Durant 364 jours par année, George perfectionnait sa seconde carrière en qualité « d’objet de décoration de gazon », tenant compagnie aux autres retraités. Il avait été invité à cette soirée pour être le cheval d’accueil aux barrières frontales du Mohawk Raceway.

En même temps que la North America Cup, la Fan Hanover Stakes était disputée et les officiels de WEG ont pensé que le lien était parfait. Venez rencontrer le dernier foal de la légendaire Fan Hanover. Cela ne nuisait en rien pour que George soit tout à fait parfait pour « le travail ». Il n’y a jamais eu une seule carotte à laquelle George ne soit pas intéressé, et que les gens soient aux petits soins auprès de lui, voilà ce dont il s’agissait avec George.

J’étais arrivé à la grande tribune pour dire à mes parents que George était en position, quand je l’ai aperçu.

« Salut bonhomme, que fais-tu ici de si bonne heure? » lui demandai-je.

L’enfant portant short et Tee-shirt bleus, sourit radieusement.

« Salut Mike… Ça va… Où est Ton?? (Tonya) »

Quand je lui expliquai la position d’accueil, il insista pour faire partie de notre équipe. Je lui dis de s’assurer que ses parents soient mis au courant de l’endroit où il se trouvait et qu’ils étaient d’accord.

Comme à son habitude, il s’est arrangé pour passer la nuit chez nous. Son atterrissage matinal se trouvait sur notre route et tout près de l’autoroute, alors cela ne causait pas un très gros inconvénient.

Retour à l’avant de l’édifice. Je portais un bien trop gros seau de carottes destinées à son buffet, tandis que l’enfant courait vers Tonya pour l’embrasser.

« Mike dit que je peux aider et rester chez vous aussi. »

Elle me regarda alors que je haussais les épaules. Avec ce regard qui disait « il t’a vite convaincu de cela, » dans un sourire plutôt résigné que contrarié.

L’enfant était déjà au travail puisque des flots de personnes envahissaient la grande tribune. Les jeunes citadins s’étiraient le cou timidement pour regarder George tandis que l’enfant leur remettait une carotte et leur faisait oublier leur angoisse en leur racontant combien le cheval était amical et touchable. Ils remarquaient comme il était doux, alors que l’enfant serrait George très fort pour prouver qu’il était de bonne compagnie.

La soirée de la Cup 2008 fut très spéciale – un produit de l’élevage ontarien, favori invaincu jusqu’à ce jour, retenait plus d’attention qu’aucun autre cheval depuis deux décennies. La foule continuait d’entrer, et durant plus d’une heure, George et l’enfant continuèrent à divertir les masses.

Le photographe de piste est venu faire une photo de George et de son « équipe », pensant que nous aimerions garder un souvenir de cette soirée. George allait faire trois ou quatre apparitions à l’accueil, mais ce fut la seule soirée dont une photo a été prise... triste.

Lorsque le travail de George fut terminé, l’enfant et moi l’avons ramené du stationnement à l’enclos, alors que les derniers arrivés se pointaient et regardaient le cheval qui avait l’air « perdu » et à la recherche de son véhicule. George étant confortablement installé dans sa stalle dans l’arrière écurie – et en mode récupération d’une surdose de carottes – nous sommes retournés à la grande tribune pour voir la grande course.

Il y avait des filées pour de la pizza, pour le maїs soufflé, la place était grouillante d’excitation. Nous avons trouvé des sièges dans la grande tribune et avons mangé pendant que se déroulait la parade d’avant course du peloton prenant part à la grande course.

À une minute du départ, il me vint une idée. Je ne suis même pas certain pourquoi et comment j’y ai pensé. J’étais loin de savoir alors, qu’en 35 années de course – ce serait mon souvenir le plus cher et le plus précieux de toute ma carrière en course. Je dis à Tonya que nous reviendrions après la course et j’appelai l’enfant à me suivre.

« Où allons-nous? »

Nous avons traversé les portes de l’enceinte et avons commencé à grimper les escaliers – style entraînement – jusqu’au dernier étage de la grande tribune extérieure. La course venait tout juste de commencer et comme des odeurs de fumée de barbecue nous arrivaient, le peloton entrait dans le dernier tournant avec en tête, le champion d’élevage ontarien.

La clameur de la foule, alors que le champion passait devant chacune des sections de la grande tribune, était incroyable.

Quand Somebeachsomewhere franchit le fil d’arrivée, la joie dans l’air, ne serait – ne pourrait – jamais être dupliquée.

« C’ÉTAIT……tellement super. »

Sur ce, l’enfant s’est précipité au bas des escaliers, en me disant qu’il reviendrait bientôt. Je suis retourné aux sièges à l’intérieur de la grande tribune, et m’assis à côté de mon épouse – qui voulait savoir où se trouvait l’enfant. Je lui ai indiqué le cercle du vainqueur envahi où se déroulait la présentation, certain qu’il s’y était faufilé. Nous avons hoché la tête et souri.

Plus tard, ce soir-là, retournés à la maison, nous avons entendu un chahut en provenance de la salle de bain.

Tonya alla y jeter un coup d’œil pour voir l’enfant dans le jacuzzi rarement utilisé et qui chantait – dans le style Julia Roberts Pretty Woman – tout en tenant le programme de la North America Cup assez haut pour qu’il ne soit pas éclaboussé. Nous avons ri… assez fort, au point que la boisson gazeuse au gingembre nous ressortait par le nez.

Le vendredi matin précédant les éliminations pour la 2015 NA Cup, j’ai reçu un texte matinal angoissant… qui arrivait trop tôt pour que ce soit quelque chose de bon.

Qu’est-il arrivé à Joey Roberts?

J’ai couru vers l’ordinateur pour vérifier le réseau social moderne qu’est Facebook. Les hommages et RIP inondaient l’écran alors que mes yeux se remplissaient de larmes. Plusieurs des messages mentionnaient le sourire qui pouvait illuminer une pièce.

Je vous offre aujourd’hui, la photographie de Joey, George et nous, en cette merveilleuse soirée de juin 2008. Voyez par vous-même ce sourire.

Note de la rédaction: Joseph ‘’ Joey’’ Roberts un palfrenier de dix-neuf ans de London, Ontario, est décédé jeudi le 4 juin après avoir succombé à ses blessures subies lors d’un accident d’automobile.

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